« CALY ! DESCENDS DE LA TOUT DE SUITE ! » J’avais huit ans à l’époque, peut être neuf, je ne saurais exactement le dire. Mais ce dont je me souviens très bien, c’est mon frère ainé, Devon, criant avec toute la voix dont il dispose, afin de me faire descendre de mon perchoir. Je pouvais facilement déceler dans son ton qu'il était exaspéré, en colère, et surtout je sentais une pointe d'inquiétude, sans aucun doute du à ce que mon père lui ferait subir s'il m'arrivait quelque chose. « Laisse moi tranquille, va trainer avec Logan ! » Je n'étais pas vraiment réceptive, que ce soit avec lui ou avec mon autre frère, le dit Logan. Le seul avec qui j'arrivais à m'entendre restait Damian, le plus âgé de mes frères. Et oui je suis l'unique fille parmi quatre enfants plus difficiles les uns que les autres. Ma mère rêvait depuis de nombreuses années d'avoir une fille, de casser cette domination masculine, et malheureusement pour elle, elle n'eut que moi, un petit garçon manqué, passant son temps à grimper sur le toit, à se bagarrer et à voler dans les épiceries du coin. Pas une franche réussite non. Devon et Logan sont jumeaux, et d'aussi loin que je me souviennes, ils ont toujours passé tout leur temps ensemble, des vrai siamois, rien de plus exaspérant selon moi. « Arrête tes conneries… si papa l’apprend, on est mal, et toi aussi je te rappelle ! » Je levais les yeux au ciel, me relevant, quittant les briques dures et froides, j'avais une vue plongeante sur notre petit jardin, la rue derrière et mon cher frère commençant déjà à lever les bras pour amortir une éventuelle chute. Je ricanais, j'étais ce genre de gamine, une petite peste, qui s'amuse en voyant son papa engueuler ses frères par sa faute. Et je le vis très bien. « Caly ! T’es dingue ou quoi ?! Maman, Caly veut pas descendre !! » Je grognais légèrement, m'essayant sur la gouttière relativement stable, je posais mon pieds sur le rebord, commençant mon ascension vers la terre ferme. Je l'avais fais tellement de fois que je ne portais plus attention aux détails, sachant ou poser le pieds, ou garder ma main afin de ne pas perdre l'équilibre. Je sautais finalement à terre, croisant les bras, je regardais mon frère, moqueuse. « Tu n’es qu’un bébé, va pleurnicher à maman, ouin ouin… » Je riais, prenant mes jambes à mon cou avant qu'il ne décide de me courir après. La vie était très simple à cette époque, ma principale préoccupation était de faire la vie dure à mes frères, de voir mon père fier de moi, de m'attirer des ennuis.

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« Calypso-Isadora Baxter-Griffin. » Je me levais, attrapant mon sac que je balançais sur mon épaule, je n’avais rien d’une fille sur le point de passer devant un conseil, j’avais plutôt l’air d’avancer vers la potence. Cela me prenait la tête, j’avais raté mon examen préliminaire d’un point un seul, et la seule raison me poussant à passer devant ce conseil était mon dossier relativement entaché. Oui j’avoue que j’ai fait quelques conneries, mais tout de même, ce n’est pas une raison pour me condamner de cette manière. « Ça va durer longtemps ? Parce que j’ai un truc à trois heure. » Le visage de la documentaliste se fermait déjà, laissant place ensuite à un air des plus outré, des plus agacé par ma personne. Je n’avais que seize ans, pourtant j’avais l’arrogance d’une fille de vingt ans. « Entrez là dedans, et ne vous faites pas remarquer, compris ?! » Je souriais, heureuse de mon effet, laissant mes pas me mener jusqu'à la porte, je poussais celle ci, me retrouvant face à trois de mes professeurs, ceux ci stoppèrent leur conversation à l'instant ou je refermais la porte d'un coup de pied. De toute évidence, eux comme moi, auraient préféré éviter ma présence, mais c'était ainsi. « Mademoiselle Griffin, asseyez vous s’il vous plait… dans le calme. » Comme s'il était nécessaire de le préciser.. peut être. Je m'exécutais, lâchant mon sac qui tombait à terre avec un bruit sourd, je passais un bras sur le dossier de ma chaise, les regardant un à un, me rendant compte que le seul sourire m'étant adressé était celui de mon professeur d'Anglais, un beau brun de trente ans que j'avais tenté d'aguicher toute l'année... sans véritable succès. « Caly, ça ne va pas être long, nous devons simplement décidé si oui ou non tu pourras valider ton année et passer dans la classe supérieur. » Je haussais les épaules, regardant uniquement Parker, depuis un an je ne l'avais jamais appelé Mr Brent, toujours Parker, que cela plaise ou non. Je me fichais de cette petite réunion autour de mon cas, je voulais simplement qu'elle se termine. « Mademoiselle Griffin, vous avez eu de bons résultats aux examens, et pourtant votre dossier est… affligeant, aucuns efforts en classe, perturbatrice, et provocatrice, il semblerait que vous ayez des difficultés avec l’autorité. » Sans doute attendait-il que j'approuve, je ne bougeais pas, je n'acceptais pas l'autorité, je devais bien le reconnaitre, mais s'il s'attendait à un changement de comportement, il risquait d'attendre longtemps... « Peut-on espérer une amélioration dans votre comportement ? Ou est-ce comme rêvé à l’utopie ? » Je retenais un rire, un sourire apparaissant malgré tout sur mon visage. « Je crois que la deuxième est la bonne. » Ma prof de biologie semblait déjà perdre patience, mais malgré cela il semblait qu'elle n'en attendait pas moins venant de moi. Heureusement j'avais un atout qu'ils ne pouvaient négliger. « Au vu de vos notes, nous ne pouvons décemment pas vous faire redoubler… sachant que cela ne changera rien, sachez malgré tout que l’année a venir sera différente. Nous vous aurons à l’œil, il va falloir adapter votre comportement vous en êtes consciente ?! » Je hochais légèrement la tête, j'aurais pu ne pas retenir mes mots, leur dire que j'avais de meilleures idées que celles mises en application jusque là mais cela ne me semblait pas très judicieux. « Très bien… vous pouvez sortir, vous aurez notre décision en fin de journée. » Ces deux coincés retournaient déjà à leurs papiers, notant sans doute mon comportement comme inapproprié. Je levais la tête, attrapant mon sac je lançais un clin d'œil à Parker, celui ci virant déjà au rouge devant mon culot. C'était une affaire qui se déroulait mieux que je ne pensais.

« Il faut qu’on arrête… ça va très mal se finir si quelqu’un l’apprend… » J'étais allongée près de lui, attrapant sa main reposant sur ses yeux, il semblait réellement inquiet, mais pas moi. Ce genre de scène arrivait fréquemment, chaque fois qu'il réalisait ce qu'il se passait réellement entre nous, chaque fois qu'il repensait aux à côté. « Tout va bien, personne ne sait, et puis on a de comptes à rendre à personne… c’est pas comme si on se baladait en pleine rue à se rouler des patins… on est super prudents ! » Sa main passait déjà dans mon dos, dessinant des cercles, il avait entendu ma voix mais ne semblait pas être d'accord avec moi. Bien sur que tout cela était dangereux, risqué, surtout si ma famille venait à l'apprendre... cela faisait plusieurs mois maintenant qu'il avait cédé à mes avances, m'enlevant ma virginité mais surtout devenant totalement accroc à ma petite personne. Il avait beau tenter de s'écarter chaque fois il revenait, avec ce besoin irrépressible d'être près de moi. « Caly… dans deux mois tu vas entrer à l’université. Ce sera la fin pour nous et… ce n’est peut être pas si mal. » Je me redressais, sentant la colère pointer le bout de son nez, il le vit bien, passant l'une de ses mains sur ma joue il tentait de m'apaiser mais je ne le laissais pas faire, virant sa main, je me levais, me rhabillant à la va vite. « Si c’est-ce que tu penses ! Je vois pas l’intérêt de continuer, on a qu’à arrêter aujourd’hui, comme ça tu n’auras plus à t’inquiéter. Après tout je suis qu’une petite étudiante que tu te tapes entre deux cours. » J'avais beau tout faire pour ne pas sembler aussi dépendante qu'il l'était, pourtant c'était le cas, ce qui au départ n'était qu'un jeu pour moi, le fantasme du professeur, était devenu plus, j'étais tombée amoureuse, il était le premier, je ne me voyais avec aucun autre. Je ne voyais plus rien, aveuglée par ses paroles qui m'avaient blessée, je ne l'avais pas vu me suivre, mais sa main se refermant sur mon bras me ramenait à la réalité, je lui faisais face. « Arrête ça. Je ne veux pas que tu partes. » Son sourire venait de vaincre mes peurs, ma colère, et je m'étonnais de son manque de logique. « Deux mois… c’est mieux que rien, profitons en. » Je ne voulais pas me contenter de ça, mais il fallait se rendre à l'évidence, la fin était proche et cela allait bien m'esquinter.

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« SHERMAN ! DEGAGE DE LA ! » Le doigt sur la gâchette je n'attendais qu'une chose qu'il bouge de là ! Il était dans ma ligne de tire comme toujours et cela commençait réellement à m'agacer. Il plongea finalement à terre, mon doigt pressant la gâchette à l'instant même ou je vis que le terrain était dégagé. Sous le coup le démon fut projeter en arrière, se retrouvant pris au piège par la même occasion. Je me rappelais parfaitement notre première chasse, un travail d'amateur, durant lequel j'avais bien failli y passer. Mais désormais, nous étions meilleurs, nous pouvions prévoir nos coups, savoir comment frapper pour gagner. Le terrain était à nous, nous avions repérer les lieux plus tôt et tout avait été prévu, le piège à démon en place, restait à le faire entrer. C'était la partie difficile, et cette fois encore, tout avait bien failli foirer à cause de l'insouciance de mon ami. Le démon se relevait, se rendant compte du piège mais je ne lui prêtais déjà plus attention. « Bravo ! T’as failli nous faire tuer avec tes conneries ! Quand est-ce que tu vas comprendre qu’il faut que tu dégages de mon viseur ! Merde ! » Une nouvelle engueulade allait éclater, n'étant interrompu que par le rire du démon. Comme chaque fois c'est Sherman qui s'occupait des exorcismes, je me contentais de piéger le démon, de m'occuper de la partie castagne, c'était mon truc alors que lui était doué avec les manipulations latines. Je me rappelais comment tout cela avait commencé, cette migraine atroce, ne me quittant plus, j'avais cru devenir folle, et sans doute serait-ce arriver sans Sherman, il avait su relativiser ce qu'il se passait et le jour où j'avais compris ce dont j'étais capable, il m'avait éviter une belle crise de folie ! Je ne contrôle pas ce truc, ce don comme il l'appelle... lui trouve ça cool, pas moi. « Encore une affaire rondement menée. On fait quoi maintenant ? » Je n'avais qu'une idée en tête, quitter cet endroit miteux, rentrant à l'hôtel et prendre une bonne douche. Toutes ces histoires de démons, je détestais ça, certes je m'étais engagé dans ce combat, mais uniquement pour lui, parce que je savais qu'un jour où l'autre il se ferait tuer si je n'étais pas là. « Alors ? Caly ? » J'ouvrais le coffre, balançant nos affaires dedans, je rangeais soigneusement mon arme avant de lever les yeux vers lui. « On rentre. » J'avais quitté ma famille, toute ma vie, ce n'était peut être pas un mal, mais tout cela me manquait, toute cette simplicité, l'ignorance, je me rendais compte aujourd'hui que je tuerais pour retrouver tout ça.

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« Cilian… » Je venais tout juste d'entrer, l'odeur était puissante, je détestais ça, je voyais Sherman allongé par terre dans un coin, Cilian penchait au dessus de lui. « Qu’est-ce qui s’est passé ici ? » Il semblait se douter que j'allais encore m'énerver, ça n'avait rien d'étonnant. Je n'étais partie que quelques secondes, histoire de récupérer du matériel et à mon retour l'un était inconscient et l'autre avait l'arcade ouverte... ça laisse perplexe. « Ça a été plus vite qu’on le pensait, mais c’est fini, Max est juste assommé. » Je levais les yeux au ciel, foutant un coup dans l'épaule de Sherman qui se réveilla dans un sursaut, tentant de trouver son arme. Cilian était déjà en train de le calmer, alors que j'avançais vers le corps étendu plus loin, mes doigts se portèrent à son coup, me rendant compte que non, celui ci non plus n'avait pas survécu à sa possession. Je baissais les yeux, passant mes doigts sur les siens que je fermais d'un geste délicat. C'était une partie du boulot difficile à accepter mais avec le temps j'étais devenue trop insensible au sort des victimes... « J’ai un mal de crâne du tonnerre.. Et je crève la dalle ! On va bouffer ? » Je me redressais déjà, jetant un regard noir à mon ami, celui ci ne faisant que m'exaspérer de plus en plus. « T’es vraiment trop con ! » Ma propre colère me frappait déjà, j’avais de la rancœur mais surtout je trouvais son attitude déconcertante. « Qu’est-ce que t’as foutu ? Je pars trente secondes et tu finis à terre inconscient ! » Je rangeais mon arme à ma ceinture, lâchant un soupire d'agacement. « Oh arrête, c’est bon j’ai rien, on a eu le démon y a pas de quoi se prendre la tête ! Relax. » J'étais partie au quart de tour, ayant parcouru en à peine une seconde les quelques mètres nous séparant, j'étais prête à le frapper, lui en coller une bonne, mais Cilian fut plus rapide que je ne le pensais, ses bras m'enfermant déjà, m'empêchant d'atteindre ma cible. Je me débattais, me calmant finalement. « Ça va, lâche moi ! » Je me dégageais, repartant en direction de la porte, tentant de me calmer comme je le pouvais. « Une vrai tigresse notre Caly… » Avant même que je n'ai pu comprendre ce qui se passait une conduite d'eau venait d'exploser, nous aspergeant tout avec une force étonnante. Je me relevais difficilement. « Bravo Caly… » Je serrais déjà les dents, le maudissant, maudissant ce truc que j'étais capable de faire et qui me rendait dingue, je n'avais aucun contrôle là dessus et cela m'exaspérer. Cilian était déjà près de moi, trempé tout comme moi, son bras était passé dans mon dos et il m'entrainait déjà vers la sortie. « L’écoute pas… allez on rentre. » Si ce n'était pour lui, j'aurais sans doute noyé l'autre idiot il y a des semaines déjà...

☜ CHOSEN ☞

Très franchement, j'ai encore du mal à comprendre comment on en est arrivé là... certains jours je ne sais pas pourquoi j'ai pris part à cette guerre. Tout ce que je sais c'est que j'ai un don, du moins c'est comme ça que Sherman appelle ça. Je suis capable de contrôler l'eau, enfin contrôler est un bien grand mot, la plupart du temps cela arrive malgré moi, quand je suis énervée, le plus souvent... alors pour le moment, ce n'est qu'une capacité dont je ne connais rien. Quand à cette guerre, je n'y aurais sans doute pas pris part si ce n'est pour Sherman, lui a décidé de chasser, d'anéantir ces saloperies de démons et je ne pouvais le laisser partir seul. On a toujours tout fait ensemble, on se soutenait, on se protégeait dans les galères, alors cette fois ne pouvait être différente. Alors aujourd'hui je me retrouvais à traquer et tuer des démons, des êtres humains par la même occasion... au début cela me dérangeait, me donnait la nausée, mais avec le temps... je crois que je me suis endurcie, j'ai arrêté de penser, je fais ce pour quoi je suis là tout simplement.

c. mortgraphics